Sommaire

2.
Les éléments
scripto-visuels
institutionnels

L’Art dans l’expérience
publique urbaine

J’entends par éléments scripto-visuels institutionnels, tous les traitements des informations alliant texte et images, émis par les institutions publiques telles que la mairie ou encore le musée des Beaux-Arts et d’Archéologie de Besançon. Il s’agira aussi d’étudier certains des éléments scripto-visuels semi-institutionnels, c’est-à-dire, ceux émis en partenariat avec les institutions publiques qui sont légaux mais proviennent d’autres acteurs.

Je prendrai à nouveau comme référence les cinq dimensions de l’habiter, pour caractériser les zones et ainsi, contextualiser les objets texte-images observés : se loger, travailler, se cultiver, se divertir et consommer.

[1] Rue Charles Nodier : dimension plutôt résidentielle
(seulement quelques magasins et institutions, principalement des habitations), extrémité Sud de La Boucle, rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes (voie à sens unique)
[1] Rue Charles Nodier : dimension plutôt résidentielle
(seulement quelques magasins et institutions, principalement des habitations), extrémité Sud de La Boucle, rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes (voie à sens unique)
[2] Parc de la Gare d’Eau : dimension de loisir et occasionnellement de divertissement
(promenade, bancs, jeux pour enfants), extrémité Sud-ouest de La Boucle, parc réservé aux piétons et aux cycles
[2] Parc de la Gare d’Eau : dimension de loisir et occasionnellement de divertissement
(promenade, bancs, jeux pour enfants), extrémité Sud-ouest de La Boucle, parc réservé aux piétons et aux cycles
[3] Rue des Granges : dimension commerciale
(magasins et restaurants-cafés tout le long de la rue : Sephora, Galeries Lafayette, KFC, Tokyo Sushi…), au cœur de La Boucle, rue réservée essentiellement aux piétons et aux cycles (semi-piétonnes)
[3] Rue des Granges : dimension commerciale
(magasins et restaurants-cafés tout le long de la rue : Sephora, Galeries Lafayette, KFC, Tokyo Sushi…), au cœur de La Boucle, rue réservée essentiellement aux piétons et aux cycles (semi-piétonnes)
[4] Place Granvelle : dimension culturelle et de divertissement
(Musée du Temps, Les 2 scènes Théâtre Ledoux, Le Kursaal, square Granvelle), au centre de La Boucle, place partagée par les piétons et cycles
[5] Rue de la Préfecture : dimension plutôt de travail
(Centre médico-dentaire Avicienne, La MDPH 25, agences immobilières, banque de France), au centre de La Boucle, rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes
[5] Rue de la Préfecture : dimension plutôt de travail
(Centre médico-dentaire Avicienne, La MDPH 25, agences immobilières, banque de France), au centre de La Boucle, rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes
[6] Avenue de Montrapon : dimension plutôt commerciale
(plusieurs magasins et restaurants : Data Music, Tabac Le Montrapon, My Little Italy…), périphérie Nord-ouest de La Boucle, axe routier partagé par les automobilistes, cycliste et piétons
[6] Avenue de Montrapon : dimension plutôt commerciale
(plusieurs magasins et restaurants : Data Music, Tabac Le Montrapon, My Little Italy…), périphérie Nord-ouest de La Boucle, axe routier partagé par les automobilistes, cycliste et piétons
[7] Rue Léon Deubel : dimension résidentielle périphérie Nord-ouest de La Boucle
rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes
[7] Rue Léon Deubel : dimension résidentielle périphérie Nord-ouest de La Boucle
rue partagée par les piétons, cycles et automobilistes

Les formes textes-images institutionnelles, sont réparties dans toutes les zones de la ville de manière plus ou moins homogène, qu’elles soient résidentielles [1], culturelles [4], commerciales [3]/[6], de divertissement [4] ou de travail [5]. Cependant, dans certaines zones de divertissement comme les parcs, elles sont très peu présentes [2]. Les formes texte-images semi-institutionnelles [7] sont elles aussi dispersées dans la ville. Ainsi, les éléments scripto-visuels institutionnels et semi-institutionnels sont davantage réparties dans la ville que les éléments commerciaux mais apparaissent ponctuellement.

La communication visuelle établie par la ville concernant les entités publiques (musée, bibliothèque, vélocité…), informe la plupart du temps sur les événements ou actualités propres à ces lieux. Elle est majoritairement présente sous forme d’affiches ou d’écrans numériques. Ces affiches de 120 x 160 cm sont positionnées dans l’espace sur des panneaux d’affichage sur pied [1]/[3]/[5]/[6] mais aussi sur des colonnes Morris [4]. Il est possible de reconnaître les affiches consacrées à ces éléments scripto-visuels grâce à la mention « Ville de Besançon » qui est inscrite généralement dans le bas des formats. Les éléments scripto-visuels institutionnels sont plus ou moins visibles selon les zones où ils sont inscrits. En effet, dans les espaces commerciaux, ces éléments se confondent avec les publicités commerciales [3]. Au contraire, ce sont parfois les formes texte-images semi-institutionnelles qui occupent majoritairement l’espace par leurs échelles monumentale [7]. Il s’agit dans ce cas d’une fresque réalisée par l’association Juste Ici, c’est un projet soutenu par la ville de Besançon qui s’inscrit donc bien dans le cadre institutionnel étant donné qu’elle ne revêt pas un caractère marchand. Ces œuvres réalisées dans le cadre du festival Bien Urbain, constituent un parcours urbain qui suscite la surprise et invite les individus à se questionner dans leur quotidien.

6 Livre : Association Juste Ici, Art dans (et avec) l’espace public, 2011 --> 2018, Besançon : Juste Ici, 2018

7 Le festival Bien Urbain est soutenu par le Grand Besançon, le Département du Doubs, la Région Bourgogne-Franche-Comté et la DRAC Franche-Comté.

Ainsi, certaines institutions publiques considèrent qu’il est bénéfique et légitime d’inscrire l’art dans l’expérience publique urbaine. C’est le cas de la ville de Besançon qui soutient le Festival Bien Urbain, art dans (et avec) l’espace public 7 , organisé par l’association Juste Ici. Ce festival débute en 2011, et « [aborde] nos lieux communs sous un nouveau regard ». Il vise à « donner une nouvelle place à l’art dans les mutations urbaines, pour prendre du recul sur l’évolution de nos lieux communs 6 ». Tous les ans, une quinzaine d’artistes internationaux investissent les rues, murs et parcs de Besançon et interviennent sur des supports différents tels que des façades, des panneaux d’affichages, des palissades en concevant des peintures murales, des installations, des affiches ou encore des créations multimédia.


6 Livre : Association Juste Ici, Art dans (et avec) l’espace public, 2011 --> 2018, Besançon : Juste Ici, 2018

7 Le festival Bien Urbain est soutenu par le Grand Besançon, le Département du Doubs, la Région Bourgogne-Franche-Comté et la DRAC Franche-Comté.

Pause visuelle
dans l’espace commun

8 Jordan Seiler est un militant anti-pub new-yorkais, ces outils graphiques lui servent à contrer la publicité physique ou numérique, il anime aussi des réseaux internationaux.

Il s’agit maintenant de prendre l’exemple d’une des réalisations de Jordan Seiler 8 créée dans le cadre du festival de 2017, Collisions. Il s’agit d’une critique du discours publicitaire et de la place qu’il prend dans l’espace public. Cette critique s’accompagne d’une proposition alternative aux éléments scripto-visuels commerciaux qu’il a développée dans Besançon, afin de se libérer de ces derniers.

8 Jordan Seiler est un militant anti-pub new-yorkais, ces outils graphiques lui servent à contrer la publicité physique ou numérique, il anime aussi des réseaux internationaux.

L’artiste a mis en place une série d’affiches présentant des motifs en noir et blanc déclinée dans la ville. Il est venu lui-même retirer les affiches publicitaires initialement présentes dans les panneaux d’affichage afin de les remplacer par ses affiches. Cet acte est démonstratif de son opinion et donne un caractère revendicateur à son œuvre.

Jordan Seiler, Collisions , juin 2017, affichages, performance. Bien Urbain 7, Besançon.
Photos : Élisa Murcia-Artengo

Ses affiches sont composées d’une répétition d’éléments visuels géométriques tels que des cercles, rayures et stries qui forment des motifs abstraits et qui donnent l’impression d’une certaine neutralité. Cette impression est renforcée par une absence de gestuelle et de profondeur, il s’agit d’une répétition de formes vectorielles en aplats noirs et blancs, marquant ainsi un caractère impersonnel. Il est possible d’émettre l’hypothèse selon laquelle l’artiste à travers cette neutralité propose de s’éloigner des codes des affiches commerciales et ainsi, de faire une pause dans notre quotidien visuel, il n’y a pas besoin d’analyser ces affiches, il s’agit seulement de motifs qui valent pour eux-mêmes. De même, le fait qu’il n’y ait pas de texte et donc pas de message direct rentre en opposition avec les affiches publicitaires, il n’est pas question de décrypter un slogan, une signature (logo ou autres signes d’appartenance à une marque). Cependant, un élément est commun à ces affiches et aux publicités : l’impact visuel. En effet, l’alternance d’une même forme noire sur un fond blanc, instaure un rythme, une vibration qui contraste avec l’espace dans lequel l’image est présente. Le contraste est renforcé par le cadrage en hors-champ des motifs, ainsi, ces visuels ne peuvent laisser indifférent malgré leur neutralité, ils invitent à se questionner sur la place des images publicitaires dans l’espace commun.

9 Le terme « brèche visuelle » est employé par l’Atelier McClane (duo d’artistes), dans le cadre de leur projet Interstice Billboards – Brèche. Leur volonté est de parasiter, questionner l’espace public ou d’exprimer un ressenti à travers la production d’affiches qui sont ensuite collées dans cet espace.

Ainsi, pour cet artiste, inscrire l’art dans l’espace public est légitime, car il permet d’interroger les habitants sur ce qu’ils veulent voir apparaître dans leur expérience du quotidien. C’est une proposition de « brèche visuelle 9 » et de nouvelle lecture des espaces, censée apporter une certaine forme de liberté. Cependant, le fait que cette œuvre et celles inscrites dans le cadre du festival Bien Urbain soient autorisées à être réalisées n’annihile-t-il pas le caractère libre et parfois contestataire revendiqué ? Ces images, ne remplaceraient-elles pas une forme de spectacle par une autre ?

9 Le terme « brèche visuelle » est employé par l’Atelier McClane (duo d’artistes), dans le cadre de leur projet Interstice Billboards – Brèche. Leur volonté est de parasiter, questionner l’espace public ou d’exprimer un ressenti à travers la production d’affiches qui sont ensuite collées dans cet espace.